La valeur
Références :
- https://institutdeslibertes.org/
- Subjectivité de la valeur sur Wikibéral
- Encyclopédie Bordas, 1994.
- Histoire de l’économie, Joseph A. Schumpeter
- Capitalism and Freedom, Milton Friedman
- Open Society and its enemies, Karl Popper
Définition de la valeur
La notion de valeur peut se caractériser selon les trois aspects :
- du vrai (connaissance),
- du bien (morale), et
- du beau (esthétique).
On peut donc dire qu’un produit (bien, service, etc.) de valeur apportera du sens tant
- qu’il apporte quelque chose de concret (rend service, utile), correspondant aux attentes de l’utilisateur (justesse entre service proposé et service effectif).
- qu’il est bon pour l’utilisateur (bénéfique, ne lui nuit pas), et
- qu’il peut en apprécier l’usage (qualité esthétique, confort, l’ergonomie, etc.).
Nous pouvons également parler de valeur tangible ou intangible, ou encore de valeur matérielle ou immatérielle. Une voiture est un objet d’une certaine valeur tout à fait tangible. Un service sera intangible. Aujourd’hui, nous pouvons aussi parler des machines virtuelles, dans le Cloud, qui sont également intangibles, mais permettent de traiter de la donnée. Ces valeurs restent matérielles, tandis que dans l’enseignement, les églises, etc. nous trouvons de la valeur immatérielle (comme de la connaissance). Nous pourrions aussi parler des œuvres d’art.
Émergence de la valeur
- La valeur apparaît lorsqu’apparaît quelque chose qui n’existait pas auparavant (donc lorsqu’il y a de l’innovation).
- Une fois la valeur créée, elle va se répandre. Cela signifie qu’elle aura un prix au moment où l’inventeur (ou l’entrepreneur) va vouloir vendre son produit.
- Ce prix de vente présuppose l’existence d’une monnaie (d’échange).
Nous apportons donc de la valeur à partir du moment où nous partageons un produit (bien, service, etc.) à quelqu’un, autour de soi. Cet apport va se faire en échange d’une monnaie par laquelle nous allons (tenter de) quantifier la valeur que nous apportons.
Paradoxe de la valeur : valeur subjective
Ce paradoxe réside dans le fait que les biens les plus utiles (voir nécessaires), comme l’eau, ont une valeur moindre (voir nulle) que des biens moins utiles, comme les diamants.
La solution est connue et reconnue, mais fut mise au propre par Galiani au XVIIIè siècle : si on définit la valeur comme étant la relation subjective entre deux commodités (en terme de quantité équivalente), alors on voit que cette valeur dépend à la fois de l’utilité et de la rareté.
La notion d’utilité est prise dans le sens de confort, ou bien-être, tandis que la rareté (ou le manque) est la relation entre quantité disponible et l’usage que l’on a du bien. À la notion de rareté, Galiani ajoutera également celle de quantité de labeur (“fatica” en italien, ici le temps nécessaire pour produire la valeur), anticipant de près d’un siècle les théories marxistes. Il ira même plus loin, car il définira aussi la notion de talent (la différence de labeur, ou de temps, nécessaire entre deux personnes pour aboutir au même résultat), et l’influence du caractère unique que peuvent revêtir certains objets (œuvres d’art, etc.).
Valeur subjective, valeur objective
Aujourd’hui, l’idée répandue est que la valeur se mesure en fonction du travail nécessaire à la produire. Cette vision repose sur les théories de Smith et Ricardo (e.g. Loi des avantages comparatifs, valeur objective) et la notion de labeur de Galiani. Cependant, ce modèle ne tient pas compte de la valeur subjective du produit.
Le principe de subjectivité admet que la valeur d’un bien dépend non pas du producteur, mais de l’acheteur : combien sera-t-il prêt à payer pour ce bien. Et l’acheteur investira plus dans un bien qui comble un besoin, une attente, ou un désir (cf. l’utilité selon Galiani).
À noter cependant, que le temps et l’énergie à investir pour produire cette valeur ne peuvent pas être négligés : cela permettra notamment de déterminer s’il est rentable d’investir dans cette opportunité : faut-il abandonner, ou bien réfléchir à une stratégie pour rendre le coût de production abordable, ou encore accroître la valeur produite pour le même coût, … Dans l’équation, nous devons également tenir compte du coût du matériel de production (e.g. les outils et logiciels utilisés par les travailleurs pour produire la valeur).
D’autre part, cette approche doit également être ajustée du fait de l’environnement dans lequel la valeur est définie : celle-ci sera, par exemple, influencée par les autres acheteurs intéressés, et/ou des autres producteurs susceptibles de proposer cette même valeur (cela nous renvoi à la notion de marché).
Quantifier la valeur
Le besoin de quantifier la valeur se retrouve à plusieurs niveaux, et notamment :
- pour fixer le prix de l’échange entre le vendeur et l’acheteur,
- pour Le positionnement de l’entreprise et de ses produits sur le marché, ou
- pour le choix et la priorisation des fonctionnalités d’un produit à développer.
Valeur et prix
La valeur varie constamment en fonction des besoins des gens. Le prix représente la valeur qu’on accorde à un produit à un instant donné. Il faut donc lui permettre de varier dans le temps, pour lui permettre de suivre les fluctuations de la valeur.
Le juste équilibre doit se trouver entre
- le rentier (qui possède le capital, et qui va investir),
- l’entrepreneur (qui prend le risque pour créer de la valeur), et
- le travailleur (qui réalise le travail pour produire la valeur).
Cela nous ramène donc aux problématiques de valeur subjective et objective : savoir si le jeu en vaut la chandelle, pour l’entrepreneur, par rapport au bénéfice escompté et au coût de réalisation.
Le rôle de la monnaie dans la valeur
La monnaie joue plusieurs rôles :
- étalon de valeur,
- instrument d’échange, et
- réserve de valeur.
Les deux premiers rôles s’exercent dans l’instant présent. Le troisième fait intervenir le temps, et donc les notions de débiteur, de créditeur et de transfert de pouvoir d’achat de l’un à l’autre au fil du temps. Ce transfert est gouverné par les taux d’intérêts entre les parties.
À noter que contrôler la réserve de valeur, c’est contrôler l’épargne, car elle constitue la réserve de valeur à l’échelle de chaque individu. Contrôler le prix des produits, endiguera la capacité à investir pour créer de la valeur, et donc bloquer l’innovation.
La monnaie va donc servir de plateforme d’échange entre les différents acteurs du marché.
L’hypothèse de Daniel Bernoulli : la valeur marginale
Au XVIIIè siècle, Bernoulli a suggéré que la valeur accordé à un dollar (i.e. une unité de monnaie) par un individu est inversement proportionnelle à la quantité de dollars qu’il a déjà cumulé. En se référant à la notion de revenu, nous pouvons identifier ce dollar additionnel à un dollar marginal, et sa signification à son utilité marginale.
L’idée derrière l’hypothèse de Bernoulli est que, même si les probabilités de perte ou de gains peuvent être calculées, celles-ci ne suffisent pas à déterminer les actions de l’individu engagé dans la démarche financière. Il faut également prendre en compte sa situation. Bernoulli a également fournit tout un ensemble de formules permettant à un investisseur d’estimer le risque et le bénéfice d’une opération commerciale en tenant compte de ces paramètres.
Tout ceci est donc susceptible d’affecter la valeur que pourrait prendre notre produit aux yeux de nos utilisateurs et clients. L’hypothèse de Bernoulli implique que nous devons également nous intéresser à la situation de nos utilisateurs et clients pour déterminer quelle valeur ils vont accorder à notre produit, c’est-à-dire s’ils vont l’acheter ou non.
Théories du prix et de la valeur d’Adam Smith
Adam Smith a codifié un certain nombre de concepts clés de la théorie des prix. Il a établie
- le concept d’interdépendance universelle entre les prix, sur la base des coûts, des catégories de revenue, de salaires, d’échéances et de profits.
- Il a également établi le concept d’équilibre naturel des prix, qui représente une situation où l’équilibre entre offre et demande effective permet de garantir un prix stable sur le long terme, tout en permettant à l’offrant de couvrir ses coûts (salaires, échéances et profits).
Adam Smith fait également la distinction entre la valeur d’usage (cf. le paradoxe de la valeur) et la valeur de l’échange. Il a ainsi énoncé ce qui sera la théorie du coût de production, constitué des sources de revenu et d’échange, et qui dépend des salaires, des échéances, et du profit.
Adam Smith a enfin abordé plusieurs aspects de la théorie sur la valeur du travail. Il a émit l’idée selon laquelle tout effort investi au delà de la valeur escompté (le point de régulation de la valeur sur le marché) devient inutile. Cette idée va inspirer la théorie de la valeur de la quantité de travail à Marx et Ricardo. Mais dans les faits, Adam Smith s’est limité ici à identifier le point d’équilibre entre l’effort investi (à qualité de travail égale) et la garanti d’un prix compétitif. Iil a ensuite considéré l’effort investi comme étant susceptible de piloter les prix sur le marché. À noter également que des études postérieures (Notamment Milton Friedman et Karl Popper) montrent que les entreprises utilisent le bénéfice au delà du point d’équilibre pour investir : c’est grâce aux bénéfices que l’entreprise peut investir dans l’innovation et créer de la valeur.
L’influence du marché sur le prix
Il est communément admit que la compétition est le moyen le plus simple pour obtenir le meilleur prix sur un bien. Pourtant, dès le début du XVIè siècle, Sir Thomas More remarqua les effets du monopole : le nombre de compétiteurs ne garantie ni une baisse, ni une hausse des prix. L’entreprise en situation de monopole visera avant tout à maximiser son profit.
Néanmoins, Beccaria et Turgot (XVIIIè siècle) ont reconnu que l’échange entre deux acteurs doit se faire dans un contexte de concurrence, pour que le ratio de l’échange puisse être déterminé : l’échange ne peut se faire dans le vide absolu, le contexte joue un rôle clé. Ce sont les fluctuations du marché qui vont mener à une situation où la demande et l’offre vont coïncider sur un prix courant : le prix du marché.
À noter que Milton Friedman, dans “Capitalism and Freedom” nous démontre que le monopole créé des opportunités pour de nouveaux entrants sur le marché, alors capable de se positionner en favorisant les clients plutôt que le profit : les clients vont alors être attiré par une offre qui leur est plus avantageuse que celle des acteurs en situation de monopole. Ils pourrons alors offrir une offre apportant un meilleur rapport qualité prix aux utilisateurs que l’existant. Un exemple pourrait être l’entrée de Free sur le marché des abonnements mobiles et d’accès internet.
Le rôle de l’entreprise
L’entreprise a pour vocation de créer de la valeur, c’est-à-dire d’améliorer la qualité, le confort d’usage, la performance, etc. du produit ou service que rend l’entreprise à ses clients et utilisateurs.
Valeur ajoutée
L’entreprise produit une valeur ajoutée selon son apport à l’économie. On retrouve là la production, mais à laquelle on doit retrancher toutes les charges (consommation, taxes et impôts, salaires, etc.). Comme vu plus haut, la différence représente les bénéfices de l’entreprise, par lesquels elle va pouvoir créer de la valeur : c’est la valeur ajoutée.
Valeur possédée
L’entreprise possède aussi une valeur matérielle (la valeur propre aux biens que possède l’entreprise), et une valeur immatérielle, c’est-à-dire la connaissance, les compétences, l’image de marque, etc. En quelque sorte, tout ce qui défini la valeur, appliquée à l’entreprise.
Valeur d’un produit, d’une fonctionnalité
Notre produit et ses fonctiaonnalités sont donc le véhicule de la valeur que l’entreprise apporte sur le marché. Il dépend à minima de trois points.
- Du positionnement du produit sur le marché, donc la stratégie de l’entreprise : il visera un segment de marché sur lequel il possède un avantage compétitif qu’il pourra exploiter pour tirer le meilleur bénéfice, et ainsi innover pour progresser dans le temps.
- De l’impact sur les clients : à quel point la fonctionnalité ou le produit répond à leurs attentes, apporte du bénéfice, avec un bon confort d’usage; et du point de vue de l’entrprise, on peut également considérer combien de clients vont bénéficier du produit et de ses fonctionnalités.
- De la charge de travail que représente la création et l’évolution, du produit et de ses fonctionnalités.
Nous pourrons quantifier la valeur de notre produit ou de notre fonctionnalité, à un instant donné, par le biais de son prix, à la foix pour les utilisateurs (et clients) et pour l’entreprise. Cela nous permettra d’évaluer son intérêt stratégique pour cette dernière.